A voir le nombre de lectures la semaine dernière, notre petite rubrique de vacances vous plaît... Alors on continue !Cette semaine, la question existentelle posée aux écrivains est Pourquoi écrivez-vous ? » Je leur laisse la parole. Douglas Kennedy, mai 2007 Pour raconter des histoires ! Pour moi, la fonction d’un écrivain est double. Il doit d’abord écrire des histoires pour les lecteurs; mais il doit mettre dans ces histoires les tensions et les inquiétudes de la vie moderne. Je n’écris pas pour raconter la vie. Il y a 20 ans, quand je commençais à écrire, j’ai essayé quelques romans autobiographiques. C’était nul. J’ai découvert que si on veut recréer sa vie comme romancier, on écrit des romans ratés. » dans Lire, dernier roman La femme du Vème ». Marie Darrieussecq, juin 2007 Mon métier, mon arme, mon rôle, c’est écrire. Pas plus pas moins. Je cherche à inventer de nouvelles formes, à écrire de nouvelles phrases, parce que c'est le seul moyen de rendre compte du monde moderne, dont le mouvement sinon nous dépasse sans cesse, demeurant illisible, incompréhensible. En ce sens toute écriture exploratrice, novatrice, est politique même apparemment éloignée du "réel", des "événements", elle fournit le langage moderne, elle bâtit les outils verbaux et mentaux qui permettent de penser le monde. Elle fait rendre gorge au prêt-à-penser, au déjà dit. » dans Livres Hebdo, dernier roman Tom est mort ». Paul Auster, février 2007 Parce que j’aime raconter des histoires. Je ne me considère pas d'abord comme un romancier mais comme un raconteur d’histoires ». Mais, bien sûr, un raconteur d’histoires est quelqu'un qui utilise la fiction, les mots, et devient, par là même, ce qu’on appelle un romancier. Mais je cherche à raconter la meilleure histoire possible, pas à faire passer telle ou telle idée. Bien sûr, une histoire est plus agréable si elle est accompagnée de métaphores, si elle plonge aux racines de ce qui fait l’être humain. Mais l’histoire prime tout. Sinon, on ne fait plus de roman, mais de l’essai. » dans Lire, dernier roman Dans le scriptorium ». Orhan Pamuk, janvier 2007 J'écris parce que j'en ai envie. J'écris parce que je ne peux pas faire comme les autres un travail normal. J'écris parce que je suis très fâché contre vous tous, contre tout le monde. J'écris parce qu'il me plaît de rester enfermé dans une chambre. J'écris parce que je ne peux supporter la réalité qu'en la modifiant. J'écris parce que j'aime l'odeur du papier. J'écris parce que je me plais à la célébrité. J'écris parce que la vie, le monde, tout est incroyablement beau et étonnant. J'écris parce que je n'arrive pas à être heureux, quoi que je fasse. J'écris pour être heureux. » sur le site du prix Nobel, dernier roman Istanbul ». Colum Mc Cann, septembre 2007 Je crois en la nécessité de la parole écrite. Mais il faut distinguer la nécessité du pouvoir. Je ne suis pas convaincu du pouvoir de la littérature aujourd’hui, mais même si la littérature n’a pas de pouvoir, j’estime que la parole écrite est totalement nécessaire. Les histoires conservent la trace du temps. Elles mettent l’accent sur les questions du cœur humain. Faulkner dit que la meilleure écriture renvoie au cœur humain. C’est la trame de toute histoire. Et les meilleures ont le pouvoir de changer les choses. C’est quelque chose en quoi je dois croire… sinon, bien sûr, il est inutile d’écrire. » sur l’Ivre de lecture, dernier roman Zoli ». Je vous souhaite une excellente fête de Noël. La semaine prochaine, ce sera la "Revue de presse" ou "Paroles d'écrivains", selon l'actualité !
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VanessaParadis : "Samuel Benchetrit écrit des mots d'amour qui me font du bien et aux autres aussi". "J'avais envie de quelque chose de solaire, de chaleureux, qui fasse du bien" : VanessaJe t’écris ces quelques mots pour te souhaiter le plus tendre des anniversaires et que tout tes vœux s’exaucent. Je t’aime. 0 0 136 Messages d'anniversaire pour le mari Jem'appelle Simon ( ipsaous sur youtube ). Cela fait maintenant plus de 15 ans que j'ai commencé la guitare. J'ai toujours appris en autodidacte et depuis quelques années j'essaye de retransmettre ce que j'ai appris au travers de vidéos. Je décompose les chansons pour pouvoir les rendre accessibles. Je fais ce que j'aurais aimé avoir Cours particuliers Apprentus Des milliers de professeurs particuliers en Belgique Bruxelles, Liège, Charleroi... pour donner des cours particuliers à domicile et au bon tarif ! Soutien scolaire, cours de maths, aide aux devoirs et rattrapage, cours de langue comme le français, anglais ou néerlandais, cours de musique comme le chant, piano, guitare ou violon et même cuisine ou théâtre. Cours aussi les soirs, weekends et en ligne. Contact direct et gratuit avec votre prof particulier !
Ecrire c'est plus un besoin qu'autre chose. Un besoin d'essayer de comprendre le monde à travers des mots, mais aussi de se débarrasser des sentiments qui nous tailladent. Ecrire c'est vital. Je t'écris ces quelques quelques mots c'est déjà trop,Trop pour ce que tu mérites,Trop déjà mon coeur s' ne devrais pas t' devrais te laisser ma vie, ma tête, mon qu'enfin revienne le je ne peux m'en torture que de repenser à toi...Et ce bruit...Est ce mon coeur qui bat?Ton prénom prononcé je ne peux l' t'écris ces quelques quelques mots c'est déjà trop,Trop pour ce que tu mérites,Trop déjà mon coeur s' t'imagine en ce moment Dans ton lit ou au milieu de gens,D'inconnus ne te connaissant du moins pas autant que t'imagine sourire au lèvres,Picolant et fumant avec tes"amis",M'oubliant pour des conneries,Riant de ton rire de t'écris ces quelques quelques mots c'est déjà trop,Trop pour ce que tu mérites,Trop déjà mon coeur s' peut être que je me goureQue tu dors attendant un nouveau même que les souvenirs t'assailles,Te laissant perdu comme après une sait? Peut être qu'une larme tu réalises combien tu es seul,Et que sans que tu le veuilles,Mon souvenir crée dans ton ventre une boule.
Bien avant de commencer par questionner le roman d’Anny Duperey[1] intitulé Je vous écris…, il conviendrait d’abord de présenter brièvement son roman autobiographique Le Voile noir, qui a été publié une année avant en 1992 et qui nous éclaire sur une part très importante de la vie de l’auteure. Quel est le rapport, diront certains, entre ces deux ouvrages ? Il ne s’agit certainement pas d’une question de succession ou de romans qui, chronologiquement parlant, se rapprochent même si plusieurs critiques ont vu dans Je vous écris… la suite » du Voile noir, terme fortement récusé par l’auteure qui y voyait plutôt une sorte de conséquence. Ce qui m’intéresse et qui est bien plus subtil, c’est que Le Voile noir détient la clef de voûte qui nous permet, en tant que lecteurs, de pénétrer dans le monde d’enfance de l’auteure et qui facilite ainsi la compréhension de ce qui nous est rapporté dans Je vous écris… Le Voile noir est le récit d’une petite fille de huit ans qui a retrouvé ses parents morts asphyxiés au monoxyde de Carbone dans leur salle de bain en 1955. Depuis ce jour, elle porte en elle l’image effroyable de cette scène ainsi qu’une immense culpabilité rendant impossible l’accomplissement de son deuil. Toute son enfance qui a précédé cet événement fût complètement occultée de sa mémoire. En écrivant ce livre, Anny Duperey croyait que l’écriture serait pour elle une catharsis mettant fin à cette douleur qui l’étouffe depuis plus de 35 ans. Mais, elle dût se rendre aussi vite à l’évidence que cet apaisement fût de très courte durée, car un an après s’est imposé à elle la nécessité d’écrire Je vous écris… Je vous écris… est, quant à lui, un récit qui retrace l’année qui a suivi la publication du Voile noir l’ après-accouchement », comme le qualifie l’auteure. Face aux multiples photos qui jalonnent le premier ouvrage et qui ont toutes été prises par Lucien Legras – qui est le père de l’écrivaine -, plusieurs extraits de témoignages et de lettres figurent dans le deuxième. Toutes ces missives ont été envoyées par des lecteurs qui ont été d’une façon ou d’une autre touchés par ce qu’a écrit l’écrivaine. Ne pouvant certainement pas répondre séparément et de façon personnelle à chaque courrier, Anny Duperey choisit d’écrire ce livre qui a une forme unique, car il renferme non seulement la voix de l’auteure, mais également toutes celles provenant de l’extérieur, à savoir celles de ses lecteurs. Je poserai donc une double question à ce texte. D’abord, comment est-ce que la réception de la voix singulière de l’auteure par ses lecteurs a-t-elle favorisé la constitution d’un lieu de rencontre ou d’interaction entre voix voire même de partage » ? Et ensuite, dans quelle mesure ce kaléidoscope de voix humaines » participe-t-il à la mise en avant d’une voix commune dès lors que la parole de soi se fait la parole de l’autre ou des autres ? Pour répondre à ces questions, j’interrogerai d’une part la matière même du livre et son mode de narration. Puis d’autre part, j’examinerai de près cette mise au jour d’une voix partagée qui surgit progressivement au fil du récit et qui donne lieu à une part d’ identité partagée ». La matière du livre et son mode de narration En se penchant sur Je Vous écris…, nous sommes immédiatement frappés par la forme composite de ce livre qui rassemble, d’un côté, un récit plus ou moins organisé qui suit une évolution clairement perceptible dans le cheminement de la narratrice sur la voie du deuil allant d’une culpabilité et d’un déni catégorique d’accepter la mort de ses parents à un consentement douloureux mais radical, et de l’autre, plusieurs lettres et témoignages qu’elle a reçus de la part de ses lecteurs juste après la publication de son précédent ouvrage. Cependant, il convient de souligner que toutes ces missives ne sont pas séparées catégoriquement du texte bien au contraire, elles sont insérées au sein de la narration créant ainsi des espaces qui fragmentent à la fois le texte et sa lecture. Elles représentent alors une composante à part entière étant donné que le livre prend forme à partir d’elles, tout comme Le Voile noir a pris forme à partir des photographies prises par le père. Nous pouvons certainement y voir dans cette disposition la volonté de l’auteure de mettre sur le même pied d’égalité son texte et le témoignage de ses lecteurs. En effet, le roman fait coexister, et ce de façon explicite, deux voix distinctes. Étant donné qu’il est construit à partir de lettres nous pouvons alors en déduire que les différents épistoliers sont autant de narrateurs. Nous aurons donc d’une part, la voix affirmée d’un narrateur homodiégétique qui s’exprime en recourant à la première personne du singulier je » tout au long du récit et, d’autre part, la voix collective des lecteurs qui est rapportée à travers des lettres dans lesquelles ils témoignent du retentissement qu’a eu sur eux la lecture du Voile noir. Nous pouvons dire que ces voix collectives sont enchâssées dans la voix singulière dans la mesure où elles apparaissent successivement à l’intérieur d’un récit-cadre qui est ici celui de l’auteure, et que c’est bel et bien l’écrivaine qui permet de les introduire – matériellement parlant – dans le corps du texte. Il serait cependant important de préciser que cette répartition est faite de façon équitable de telle sorte qu’aucune voix ne couvre l’autre. Nous avons plutôt l’impression, en lisant ce roman, que les différentes voix se font écho, s’appellent et s’interpellent surtout en ce qui concerne les voix des lecteurs qui présentent une diversité de réactions vis-à-vis d’une seule lecture et qui, nécessairement, se ressemblent à quelques degrés. On aurait certainement pu faire face à un écrivain qui s’efforce de s’imposer en tant qu’instance narrative qui cherche à monopoliser le discours, mais l’intention de Duperey s’inscrit loin de là. L’écrivaine annonce dès le début son désir de ne pas garder ces retours pour elle, mais de partager cette belle écriture sincère » p. 10 qui lui vient certes de l’extérieur, mais qui intérieurement l’affecte. Elle en fait d’ailleurs l’aveu dans les dernières pages du livre en s’adressant intimement à ses lecteurs ceci est aussi votre livre, à égalité avec moi » p. 229. Entre publication et réception, se joue alors l’essentiel de cet échange de paroles. Nous parlons bel et bien d’un échange qu’on peut même aller jusqu’à qualifier de dialogue puisqu’on a deux voix qui communiquent indirectement à travers l’écriture épistolaire. Si l’écrivaine qualifie Le Voile noir de monologue adressé à des lecteurs indistincts » Je vous écris… qui lui, fait intervenir la parole de l’autre, peut effectivement être perçu comme étant un dialogue. Ce même constat est fait par l’auteure qui avance de façon intéressante le dialogue était ailleurs. Il était avec vous, d’une manière ou d’une autre, chacun me donnant ce qu’il avait à me donner, répondant parfois d’une façon incroyablement précise à mes questions, à mes doutes. Indépendamment de ces lettres des inconnus, Je vous écris… peut à lui seul être considéré comme une longue lettre collective une sorte de lettre-réponse, voire un retour de voix ou de parole. Une lettre devrait, par destination, permettre à son auteur de communiquer avec son destinataire. Comme nous l’avons annoncé précédemment, Anny Duperey écrit ce livre pour répondre à tous ces anonymes qui lui ont écrit. Toutes ces marques d’amitié que vous m’avez témoignées », dit-elle, de compréhension, de chaleur ont eu une telle importance pour moi qu’elles m’ont conduite à vous écrire aujourd’hui pour vous faire part d’un projet qui me tient fortement à cœur » p. 9. Son projet est donc clair dès le début écrire un livre où parallèlement elle fait part de son parcours après la publication du Voile noir et répond en grande partie à ses lecteurs tout en y incorporant leurs propres témoignages. L’idée d’interpréter ce livre comme étant une lettre est fortement renforcée par l’épilogue qui annonce d’ores et déjà la nature du récit qui va suivre comme telle. Notons que ce dernier reproduit la forme classique d’une lettre on a une phrase introduisant le destinataire À vous qui m’avez écrit » p. 9 et une formule de politesse inscrite vers la fin Amitié » L’expéditeur est ce je » qui est à coup sûr Anny Duperey dont le nom préfigure sur la couverture du livre. Nous remarquons que les lecteurs sont présents dès le début non seulement en tant que destinataire de l’épilogue dans lequel un je » s’adresse directement à un vous » renvoyant à ceux qui ont envoyé les lettres[2], mais aussi dans la place qu’ils occupent dans le titre même de l’ouvrage qui instaure dès la première heure un certain rapprochement entre ces deux voix. Le recours constant d’Anny Duperey au pronom personnel vous » ainsi qu’à la forme impérative indique fort judicieusement le mode de fonctionnement trop direct qu’elle adopte vis-à-vis de ses lecteurs. C’est pour cette raison que le texte peut être perçu comme étant un discours oral directement adressé à un destinataire particulier. Toutefois, aucune lettre ne mentionne le nom de son destinateur, aucune information sur le lieu ou la date n’est également indiquée. Tout a été supprimé volontairement par l’écrivaine qui a conclu un genre de pacte avec son lecteur dès la préface en lui annonçant qu’elle préservera son anonymat et qu’il ne sera BIEN SUR, CITE AUCUN NOM, AUCUNE DATE, RIEN QUI PUISSE PERMETTRE A QUICONQUE DE [LE] RECONNAÎTRE » C’est uniquement l’objet des lettres, ou disons plutôt toutes les paroles de remerciement, d’encouragement, d’affection, de confidence, etc. provenant de ces missives qui intéressent l’auteure. Il est fort probable que Duperey ne pouvait pas insérer tous les messages qu’elle a eu en retour et qu’elle aurait certainement dû en sélectionner ceux qui lui parlaient le plus. Dans tous les cas, ce qui comptait pour elle, c’était de faire dialoguer sa voix avec celle de ses lecteurs et de faire participer » ces deux discours dans la création d’un seul et même ouvrage. Le livre apparaît ainsi comme un terrain de rencontre, une œuvre commune où s’entrecroisent plusieurs voix différentes, un support rassemblant un florilège de voix provenant du dedans et du dehors et qui circulent ouvertement entre elles. C’est cet aspect du livre comme étant une création à plusieurs, qui se trouve commenté par l’écrivaine quand elle rappelle au tout début qu’ il s’agirait d’une participation tout à fait anonyme à un kaléidoscope de voix humaines qui viendraient en contrepoint d’un texte que j’ai commencé à écrire et dans lequel je raconte tout simplement, longue lettre à vous adressée, ce qui m’est advenue – moralement, bien sûr – au sujet du deuil, dès le moment où j’ai posé le stylo après avoir écrit le dernier mot du Voile noir et pendant un an environ après. D’après cette citation, Je vous écris… se propose de se faire entendre comme un récit qui fait participer plusieurs voix ou comme une expérience d’écriture conjointe entre auteure et lecteurs. Tout un kaléidoscope de voix humaines », comme le signale si bien l’écrivaine, se trouve rassemblé d’une lettre à l’autre. Ce sont bel et bien les lettres qui composent le récit et qui favorisent cet entrecroisement de voix. En accordant une attention particulière à ce regroupement de différentes paroles, nous allons voir que malgré leurs différences d’origine surtout, c’est-à-dire de provenance, ces dernières se rejoignent également dans la création même d’une voix commune. D’une voix commune à une identité partagée » Mis à part l’aspect formel de ce texte qui organise et distribue partialement la parole entre auteure et lecteurs, on se doit d’admettre que le lien réunissant toutes ces voix est bien plus fort qu’il ne le paraît. En effet, en y prêtant plus d’attention à l’objet de la plupart des lettres, nous remarquons le surgissement d’un grand intérêt de la part des lecteurs. D’ailleurs, Anny Duperey souligne sa grande surprise face aux différentes réactions qu’elle a eues en retour en disant Je n’avais pas pensé du tout, du tout, que des gens, des personnes me répondraient, me parleraient aussi directement, m’offrant sentiment de partage, paroles d’apaisement, mise en garde aussi parfois sur la difficulté du chemin à parcourir encore » Le Voile noir est un récit à travers lequel l’auteure met en avant une sorte de confidence qu’elle a longtemps hésité à diffuser auprès de son public et au cœur de laquelle elle replonge son lecteur dans Je Vous écris…. Quand on parle de confidence, on est forcément amené à faire face à un récit à portée autobiographique, donc personnel dans la mesure où un je » intervient pour faire part de quelque chose d’intime, à savoir quelque chose qui fait partie de son identité et qui lui est propre. Ici, la narratrice relate un drame d’enfance qu’elle a vécu et qui ne cesse de la pourchasser en recourant à une voix nue, c’est-à-dire une voix qui se dévoile tout en se dépossédant de son intimité. De ce fait, plusieurs lecteurs ont exprimé à juste titre leur compassion envers l’auteure. Votre histoire m’imprègne » disait une lectrice. Je chemine à vos côtés et je vous comprends si bien » disait une autre. Ces dernières opèrent ainsi des rapprochements entre l’histoire de cette petite fille de huit ans et la leur. Une expérience affective [3]», pour reprendre l’expression de Vincent Jouve dans son essai L’effet-personnage dans le roman, se trouve ainsi partagée et permet de renforcer le lien qui rattache les deux instances narratives du récit. L’écrivaine a été qualifiée, entre autres, de petite sœur du bout du monde – du bout des larmes – du bout du silence pudique » de sœur en regrets éternels’ » et de personne qui est fragilement proche » de ses lecteurs. Toutes ces appellations accréditent la proximité qui est soulignée dans la majorité des lettres et qui prouve que le lecteur s’identifie au je » autobiographique et qu’il s’actualise dans l’énonciation »[4]. Prenons l’exemple d’un lecteur qui affirme que Je vous écris… a été écrit pour vous, pour nous, pour moi » disait-il. Une autre lectrice va dans le même sens en s’adressant étroitement à l’écrivaine Je ne pourrai plus jamais ouvrir ce livre sans une certaine précaution tant votre douleur est devenue mienne » La voix du je » destinateur et celle du vous » destinataire s’entremêlent en créant ainsi des va-et-vient qui permettent le fusionnement de l’intime et de l’extime, de la voix singulière et de celles des lecteurs. Une forme de reconnaissance se crée petit à petit et c’est bien évidemment le fait de se retrouver ou de retrouver une part de soi dans la parole de l’autre qui permet aux différentes voix de se rencontrer. Le discours de l’écrivaine se fait alors l’écho de plusieurs autres voix jusque-là muettes. Considérant ici ce que disait une lectrice tout en tutoyant l’écrivaine et en la qualifiant de son double » Tu dis des choses que j’ai parfois écrites pour moi seule. Tu fais des gestes que j’ai faits. Cela fait une drôle d’impression de se découvrir un double, quand on croyait sa souffrance profonde si unique et intraduisible. On l’aura bien compris, l’auteure se fait ici un exemple représentatif d’une multitude de voix qui ont, à un moment donné, vécu un traumatisme personnel ou une situation semblable. Ce qui rassemble donc toutes ces voix, c’est le fait d’avoir partagé un même vécu, d’être regroupées sous un même sujet qui peut à la fois appartenir à soi comme aux autres et qui est ici la douleur, le manque et plus particulièrement le deuil. Chaque lecteur a pu donc déchiffrer sa propre histoire dans Le Voile noir puisqu’il s’est senti concerné, voire même impliqué dans ce qui lui a été rapporté d’où il éprouve la nécessité de prendre la plume et de répondre. Une sorte d’ identité partagée » s’instaure donc et se trouve soulignée par les lecteurs. Votre livre fait sauter un verrou que je n’avais simplement jamais perçu », disait un lecteur, entendre, par vos mots, que quelqu’un d’autre que moi a vécu ces émotions-là, me reconnaitre, vibrer en accordage à des sentiments que jusqu’ici, sans me l’être expressément dit, je croyais être le seul à avoir ressentis. Le seul- donc un monstre. Votre livre, au fond, me rend une identité commune » Cette forme d’ identité commune » telle qu’elle apparaît décrite ici, implique que chaque lecteur se retrouvera dans un coin de ce livre. Il se démarquera ainsi de sa propre voix et s’identifiera à la voix de l’auteure tout comme l’auteure disparaîtrait en tant que sujet parlant afin de laisser place à une voix inscrite dans un sorte d’existence partagée et qui s’adresse directement à tous. Nous avons donc l’impression que toutes ces voix se rejoignent afin de donner lieu à une seule voix collective ; une voix qui unit plusieurs personnes à la fois. Nous sommes certes – formellement – en face de deux voix qui s’expriment délibérément dans le texte, mais qui représentent une seule et même voix qui se construit en filigrane. Cette voix universelle se forme et se détermine dans l’entrecroisement de tous ces points de vue invoqués par le texte. Cette interprétation justifie fort logiquement le projet d’écriture de l’auteure qui voulait fusionner à la fois deux voix étrangères mais proches. En ce sens, la suppression des noms des destinateurs des missives peut être lue, sous cet angle-là, comme une stratégie de la part de l’auteure qui ne voulait garder qu’une seule identité ; une identité dans laquelle s’inscrivent toutes ses voix, à savoir une identité partagée ». Cette nécessité ou plutôt ce besoin de partager » une part de la douleur qui se trouve au fin fond de chacun de nous, est un point essentiel chez Duperey. La citation de Simone de Beauvoir qu’elle place en exergue de son livre en est l’ultime révélateur Toute douleur déchire ; mais ce qui la rend intolérable, c’est que celui qui la subit ce sent séparé du monde ; partagée, elle cesse au moins d’être un exil. Ce n’est pas par délectation morose, par exhibitionnisme, par provocation que souvent les écrivains relatent des expériences affreuses ou désolantes par le truchement des mots, ils les universalisent et ils permettent aux lecteurs de connaitre, au fond de leurs malheurs individuels, les consolations de la fraternité[5] Conclusion De telles observations montrent que le dialogue entre auteur et lecteur se fait directement et explicitement dans Je vous écris…. Nous nous retrouvons face à une forme de répartition égalitaire de deux instances narratives qui se présentent comme ayant la même dignité, voire la même importance dans l’espace livre. Ce genre d’écriture à deux nous conduit à repenser la valeur des cloisonnements, du moment qu’auteure et lecteur, intime et extime, privé et public se combinent dans un seul et même dispositif. La fabrication des voix qui peuplent le récit se fait par le biais des lettres qui, en tant que médium intermédiaire, ont favorisé d’une part, la communion du dedans et du dehors, et d’autre part, la reconstitution d’une voix commune, reconnue par tous et qui est la voix de la douleur. Cette voix commune permet à son tour le dépassement des divisions et des séparations tout en donnant naissance à une part d’ identité partagée » qui se trouve incarnée dans ce récit à travers la voix singulière de l’auteure représentative d’un exemple parmi tant d’autres. Je finirai donc sur cette citation d’Anny Duperey dans laquelle elle parle justement d’un sort commun » expression qui éclaire davantage l’ensemble de ces propos Vous m’avez sortie de ma tour d’ivoire pour m’amener dans cette contrée inconnue le sort commun. Petit à petit, je m’y sens chez moi. Je me reconnais en vous comme vous en moi. Je ne suis plus une princesse blessée cloitrée en son mal et qui se hausse de cette certitude d’être unique avec sa douleur. Mon histoire est unique, oui, comme toutes les histoires, mais ma douleur ne l’est pas. Khadija Benfarah Université Paris-Sorbonne CELLF Notes [1] Anny Duperey est une comédienne et écrivaine française. Elle a commencé à écrire dès son jeune âge sous forme de journal intime puis, progressivement, sous forme de livre. La mort accidentelle de ses parents a bouleversé le cours de sa vie, car non seulement elle a été séparée de ses parents, mais également de sa sœur. En effet, aucune des deux familles ne pouvait prendre en charge les deux filles ensemble, d’où l’obligation de se départager la tâche. Anny fût donc élevée par sa grand-mère paternelle tandis que sa sœur a été confiée à sa grand-mère maternelle. Cet événement dramatique l’a encouragée à s’investir dans des associations pour enfants orphelins elle est la marraine de l’association SOS Villages d’enfants. [2] À ce sujet, Alberto Manguel rappelle, dans son livre Une histoire de la lecture, que Tout texte suppose un lecteur ». [3] Vincent Jouve, L’Effet-personnage dans le roman, Paris, PUF, 1992, 1998, p. 134. [4] Expression que nous empruntons à Bloch Béatrice dans son article intitulé La construction de l’émotion chez le lecteur. Immersion et persuasion esthétique », Poétique, 2010/3 n° 163, p. 339-348. DOI URL Consulté le 02/02/2019. [5] Simone de Beauvoir, Tout compte fait, Paris, Gallimard, 1972, coll. Folio », n° 1022, p. 169. Bibliographie Anny Duperey, Le Voile noir, Paris, Seuil, 1992. Anny Duperey, Je vous écris, Paris, Seuil, 1993. Vincent Jouve, L’Effet-personnage dans le roman, Paris, PUF, 1992. Simone de Beauvoir, Tout compte fait, Paris, Gallimard, 1972. Alberto Manguel, Une histoire de la lecture, 1998,. Bloch Béatrice, La construction de l’émotion chez le lecteur. Immersion et persuasion esthétique », Poétique, 2010/3 n° 163, p. 339-348. DOI URL
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